Mâche ou crève !
Parfois, dans les cas désespérés, on
est content de s'accrocher à n'importe quelle planche, même pourrie.
Je pense à l'un des plus grands cauchemars de l'occident contemporain,
les études scientifiques testant les effets de l'alimentation sur notre santé. Vous
voyez de quoi il s'agit, sans doute: ces bombes qui explosent périodiquement au
détour des magazines et qui nous expliquent avec force statistique que les délicieux
menus dont on se nourrit innocemment depuis des lustres reviennent à avaler en
entrée une promesse de cancer atroce, en plat une certitude de maladie cardio-vasculaire
et en dessert une épidémie d'obésité. Comme l'explique le terrifiant dossier
qui ouvre ce journal, la moitié du pauvre monde est en train de mourir de faim.
L’autre moitié découvre un peu plus chaque jour comment elle va mourir d'avoir
mangé.
Et tout ça est asséné avec à peu près autant de cohérence
que le discours gouvernemental sur les reformes.
Prenez un exemple simple: les fameux 5 fruits et légumes
... vous vous souvenez ... la semaine passée ils étaient encore le choc de croissance,
une panacée, la promesse d'un éden vitaminé et fibreux qui permettait de
marcher svelte vers un avenir repu. Déjà, on sent qu'on va nous annoncer, au mieux
une regrettable erreur de communication comme vient de le faire monsieur Sarkozy
à propos. J’ai sous les yeux les conclusions d'un diététicien qui pense que 5
c'est beaucoup trop et d'un autre qui trouve que 5 ce n'est pas assez... merci
du conseil !
Je vais vous dire, parfois je regrette les bon temps d’avant,
par exemple l'heureuse époque de notre jeunesse au moment de la vache folle ! Une
saison entière de dinguerie à flipper sa race (bovine). Tant d'angoisse pour un
bout de macreuse, c'était un peu absurde sans doute mais quel bonheur de tout
concentrer sur un seul produit ! Ça permettait de décompenser comme des malades
sur tout le reste !
Le reste aujourd'hui mais vous n'y pensez pas ! La charcuterie,
avec tout ce gras, c'est une tuerie ... les céréales avec t out ce sel un
cauchemar ! Les sucreries c'est plein de sucre, les laitages c'est plein de
lait, la viande c'est à proscrire ; le poisson à éviter : quand il vient des
rivières il est plombé, quand il vient des mers avec ce que l'on raconte sur la
surpêche, il est plombant ! du coup en pilant un peu de prozac allégé dans un
fond de bouillon de légumes bio pour oublier la dureté des temps, on n'use ses
pauvres dents décalcifiées sur un quignon de pain sec parce qu'on a cru
comprendre que le pain était le dernier aliment qui échappait au festival du
film d'horreur alimentaire permanent . Quelle erreur ! On croit que le pain est
bon. C’est bien la preuve que l'on va nous redire demain qu'il est mauvais !
Au moins a force me direz vous, tout ça finira par avoir
un bon coté : à force d'écouter les diététiciens, on n'a l'appétit tellement
coupé qu'on va bien finir par maigrir ... maigrir mais vous n'y pensez pas ! Un
psychiatre vient de faire un livre pour expliquer à quel point les privations
sont dangereuses! Il a écrit un ouvrage "mangez en paix !". Quel
titre absurde comme si on le pouvait encore !
C’est d'ailleurs pourquoi à titre personnel, j'ai décidé
de me refugier dans une solution liquide ! Pour oublier tout cela je bois ! Entendons
nous, je ne parle pas des alcools forts (risque atroce pour l'œsophage) ni de
vins fins (avec ce qu'on raconte sur les traficotages de pesticides dans les
domaines viticoles, merci). Je bois de l'eau, n'importe quelle eau et surtout
celle du robinet, encouragé par une nouvelle étude que vient de publier une éminente
société de néphrologie américaine qui clame " boire de l'eau toute la
journée ne sert à rien, mais cela n'est pas nocif" un truc qui s’avale, ne
sert à rien mais ne fait pas de mal, waouh ! le bonheur !